Je trompe Adobe

Quand j’ai eu accès à un ordinateur à la fin des années 90, j’ai tout de suite été fasciné par Microsoft Paint. Ce simple logiciel de dessin m’a amené à mon métier actuel, celui de graphiste et illustrateur en freelance.
Je vous rassure, je n’utilise pas ce logiciel pour exercer mon métier aujourd’hui. Je me suis formé comme la grande majorité de mes confrères à Photoshop et la suite Creative Cloud.
Mais depuis quelques temps, je me confesse : je fais des infidélités à cet indispensable du graphisme avec des alternatives à Adobe

Les illustrations de cet article sont certifiées 100 % sans OGM et sans produit Adobe.

NB : Je ferai souvent référence à Photoshop car c’est pour moi le logiciel emblématique de la suite Creative Cloud d’Adobe. Et c’est probablement le logiciel qui fait le pont entre les différents métiers de graphiste.

Un pépin dans ma relation

En effet, quand j’ai songé à devenir freelance en 2016, je me suis beaucoup renseigné sur les démarches, les charges, l’investissement que j’allais devoir faire pour être opérationnel. Et naturellement, j’ai réfléchi aux moyens de faire baisser les coûts. À cette époque, j’avais déjà un matériel informatique tout à fait convenable pour mon métier mais pas de licence Creative Cloud d’Adobe.

On nous prend pour des poires

Je pourrais me contenter des versions pirates facilement trouvables, mais quand on veut être honnête et professionnel, on se doit de faire cet achat. OK, mais combien alors ?

Patrick Moll sur le blog alpha-numerique.fr a déjà fourni un excellent travail sur le sujet (lien de l’article par ici). Bien que certains prix ne sont plus tout à fait à jour (quelques euros près, rien de dramatique), je vous invite à le parcourir. La conclusion reste assez effarante.
En voici un extrait :

Adobe a calibré son offre sur les besoins des grands comptes qui sont les seuls non-perdants financièrement. Tous ceux qui n’ont pas besoin de la totalité des outils du Creative Cloud sont perdants, et le sont d’autant plus que leurs besoins – ou leurs moyens – sont limités.

Source : Patrick Moll – Alpha Numérique

Une licence en “location”

Le principe même de l’abonnement sous-entend que vous ne détenez pas la licence contrairement à l’achat. C’est bête mais en fait si un jour vous arrêtez votre abonnement, vous n’avez en principe plus moyen de travailler sur vos propres fichiers. Oui je parle bien de VOS .psd / .ai / .autrefichier que vous avez fait à la sueur de votre périphérique.

En principe bien sur, puisqu’il existe des logiciels qui ouvrent les fichiers Adobe avec plus ou moins de fidélité. Ça reste tout de même un sacré blocage pour moi de se dire que mes fichiers de travail où j’ai passé parfois des dizaines et des dizaines d’heures ne pourront plus être ouverts si j’arrête mon abonnement. Et des raisons d’arrêter cet abonnement il n’en manque pas :

  • prix trop cher à long terme comme on a pu voir plus tôt
  • prix qui pourrait augmenter sous prétexte de proposer plus de logiciels (inutiles dans mon cas de figure) dans la suite Adobe
  • conditions d’utilisation de la suite qui évoluerait dans un sens qui ne me plairait guère

Je suis sûr de trouver d’autres raisons en y réfléchissant longuement, mais je pense que vous avez compris le fond du problème.

Complète en apparence

La suite Adobe est géniale, elle est complète en terme de fonctionnalités et de complémentarités. Mais avez-vous déjà vraiment testé d’autres logiciels de graphisme qui ne sont pas de cet éditeur ? Est-ce que le confort d’avoir déjà tout à disposition en prenant la suite Adobe n’empêche pas les graphistes d’essayer d’autres logiciels ?

Quelque part je me dis que ce confort est une bride à la productivité et peut-être même à la créativité. Si d’autres logiciels sortent de l’ombre, c’est généralement parce qu’ils proposent une approche, des fonctionnalités, des outils, un feeling différents de ce qui existe déjà.

Une pomme de terre et une pomme, ça ne se ressemble pas tant que ça…

Le soucis c’est qu’en ayant souscrit à l’abonnement de la Creative Cloud, on veut probablement amortir son coût en profitant au maximum de ses logiciels. C’est normal, mais du coup on s’oblige inconsciemment à les utiliser même quand ils ne sont pas les plus adaptés à nos besoins et à délaisser les nouveaux logiciels concurrents qui se démarquent par leurs caractéristiques originales.

L’usine à gaz

Photoshop est à la base un logiciel de retouche photo. Sauf que peu de gens s’en servent pour ça. D’ailleurs Lightroom a vu le jour pour remplir ce rôle avec plus d’efficacité.

Photoshop c’est un peu le logiciel fourre-tout d’Adobe. On peut faire du bitmap, du vectoriel, du montage et de la retouche photo, de l’UI, du digital painting, manipuler des objets 3D, préparer des fichiers pour de la vidéo ou de l’animation et bien d’autres choses.

Fourre-tout mais pas forcément optimal dans ces divers domaines. Et c’est justement sur ces lacunes que les logiciels concurrents se démarquent : Sketch pour l’UI, Affinity Designer pour le dessin vectoriel, Corel Painter pour le digital painting, et j’en passe. Si vous pensez que ces derniers se contentent de copier Photoshop en enlevant le surplus inutile, vous vous trompez.
Allez y, jetez un œil ! Vous serez surpris de voir à quel point Photoshop prendra un coup de vieux sur certains aspects.

Photoshop ne mourra jamais

Quand je parle de ce sujet avec mes confrères, on me rit souvent au visage en ajoutant parfois : « Photoshop ne mourra jamais, il n’y a rien qui puisse le remplacer. » .

Vraiment ?

J’adore ce genre de réplique car il me suffit de répondre facilement par trois mots (six en réalité) à cette personne :

  • Quark Xpress
  • Internet Explorer
  • Adobe Flash

Et là tous ceux qui ont quelques années dans le domaine comprennent où je veux en venir pendant que j’ai un rire maléfique après avoir bouché l’insolence de mon interlocuteur. Pendant leurs années de gloire, il était impensable d’imaginer que ces trois géants allaient sombrer dans le néant.

Mais alors ? Photoshop va mourir ? !

Non je ne pense pas. Je pense toujours que la suite Adobe et Photoshop en particulier sont des logiciels fantastiques. Mais je regrette que la formule d’abonnement soit imposée alors qu’on avait le choix entre l’achat et l’abonnement jusqu’à CS6.

De plus Adobe est plus dans une stratégie de compléter sa suite avec diverses fonctionnalités qui incitent encore et toujours l’utilisateur à ne pas sortir sa truffe humide de son pack de logiciels. Dernier exemple en date : Adobe Stock, une banque d’image intégrée aux logiciels de la suite.
C’est surement un gain en productivité, mais encore une fois ça met de belles œillères sur l’utilisateur qui ne verra peut-être pas ce qui se propose ailleurs.

Enfin, et c’est un avis très personnel, mais j’ai l’impression que depuis quelques années les logiciels Adobe se contentent de “suivre” ses concurrents en ajoutant leurs fonctionnalités avec généralement un peu plus de réussite (il faut bien l’avouer).

Se passer de Photoshop ou de la suite Adobe ?

Il existe aussi des fruits dont il ne vaut mieux pas s’attarder dessus.

Selon vos besoins il existe différents logiciels en plein essor. Toutefois il faut rester prudent et réfléchir à deux fois avant d’abandonner son logiciel historique. Je reviendrai sur les bonnes questions à se poser dans un prochain article.

Pour ma part, est-ce que j’abandonne complètement Adobe ? Non, j’ai dit que je le trompais, pas que je le quittais. Voilà les diverses raisons de revenir vers Adobe que je pourrais avoir :

  • il n’existe pas forcément d’équivalent ailleurs
  • les concurrents ne sont pas aussi intéressants que les logiciels Adobe (trop complexes, pas assez fournis en fonctionnalités, trop chers…)
  • je n’ai pas forcément envie de réapprendre un logiciel de zéro pour un usage occasionnel
  • les logiciels ne sont pas stables ou ne sont pas suivis par leurs éditeurs et il faut donc s’attendre à des bugs ou des crash
  • un client me paye pour avoir mes fichiers de travail. Généralement il souhaitera des fichiers propres à Adobe (.psd, .ai, .indd, etc), et je sais qu’actuellement aucun concurrent ne permet encore d’avoir un export fidèle à 100 % dans les formats propriétaires d’Adobe.

Même si vous restez avec votre abonnement Adobe, j’espère que cet article vous aura donné envie de voir ailleurs. Cette phrase est très ambigüe sortie de son contexte, je le conçois.
Dites-moi vers quelles alternatives vous vous orientez pour sortir de cette dépendance. Ou au contraire rappelez-moi à quel point je suis dans le péché avec vos pieux arguments. J’ai hâte de lire vos commentaires.


Retrouvez une partie de mes projets de design ou mes travaux artistiques. Si mon profil vous intéresse, je suis disponible pour vous accompagner dans vos projets : contact.

11 réponses sur “Je trompe Adobe”

  1. Bonjour,
    C’est désolant qu’Adobe ne compte qu’en $ ou €.
    Je fais de la photo en amateur donc Photoshop est super et je m’amuse aussi avec Indesign, Illustrator et Dreamweaver CS4 que j’avais acheté. Là j’ai économisé en espérant acheter des nouvelles versions. Impossible, il faut passer par un abonnement impossible pour moi qui ne gagne rien en utilisant ces logiciels. Adobe ne pense qu’aux professionnels argentés. C’est désolant. J’ai trouvé Affinity Photo qui est bien supérieur à Photoshop 4 mais bien sur moins évolué que les dernières versions d’Adobe. Capture One est même supérieur è LR. Bonne chance aux nouveaux développeurs pour détrôner Adobe et sa suffisance.

    1. Bonjour,
      Que Adobe pense à faire du fric c’est normal, c’est une entreprise qui doit avoir un coût en R&D astronomique. Le soucis c’est l’obligation à l’abonnement qui n’est pas gagnant sur le moyen/long terme pour les petites structures ou les amateurs (comme beaucoup le pensent à tort).
      Je fais peu de photo ou de retouche, pour le coup je ne peux pas vraiment me prononcer pour Aff. Photo ou Capture One. En revanche peut-être que vous devriez vous pencher sur les versions Element des logiciels d’Adobe qui ont un prix d’achat en limitant tout de même les fonctionnalités par rapport aux version CC. Ça pourrait être une alternative intéressante pour vous qui pratiquez en “amateur” (← n’y voyez pas là un terme péjoratif)

  2. Cet article présente une analyse très intéressante !
    Que pensez-vous personnellement du logiciel open source Krita ?
    Clairement plus tourné vers le digital painting que vers la retouche ou le vectoriel mais il semble avoir un franc succès, étant même par certains considéré comme dépassant Gimp , l’un des inconvénients de Gimp étant l’absence des calques de réglages , entre autres fonctions .

    1. Gimp est un logiciel de retouche photo, Krita est un logiciel de digital painting. Difficile de comparer les deux vu qu’ils ont des finalités différentes. Ceci dit, je suppose qu’on peut utiliser Gimp pour faire du digital painting puisqu’il se calque beaucoup sur Photoshop qui a tout ce qu’il faut pour en faire.
      Pour ma part, j’ai testé Krita il y a très longtemps et j’en étais pas satisfait à cette époque. Mais le logiciel a beaucoup évolué et a de sacrés arguments dans le domaine de l’illustration. Il faudrait que je le reteste pour pouvoir en donner un retour pertinent. Mais le mieux étant de vous faire votre propre avis en le testant, d’autant plus qu’il est gratuit 😉

  3. Bonjour et merci beaucoup pour votre réponse !
    Je viens justement de télécharger la toute dernière version de Krita, en effet ce logiciel semble nettement plus se rapprocher de Corel Painter que d’Adobe Photoshop, toutefois je constate des fonctions de retouche et la possibilité de lui ajouter le plugin multifonctionnel G’mic , merci de m’avoir indiqué PaintStorm Studio que je ne connaissais pas, je pense que Krita doit s’en rapprocher .
    Gimp comporte une partie pour la peinture mais c’est vrai que ce n’est pas sa spécialité au départ, on peut aussi penser à Paint Shop Pro qui, malgré son nom, est de plus en plus orienté photo que création avec malheureusement très peu de vraies évolutions depuis les cinq, six dernières versions .

  4. Bonjour,
    Je viens de tombe sur ce blog en cherchant des infos sur affinity designer.
    Même si cet article très intéressant a été écrit il y a presque 1 an, je ne pouvais pas m’empêcher d’écrire un petit mot.
    Tout le monde se plein du fait qu’adobe ai choisi ce mode de fonctionnement,pour moi, la raison est simple, c’était le seul moyen de lutté contre le piratage.
    Tout le monde veut avoir un des meilleurs logiciels de retouche sans déboursé 1 €.
    Internet a fait naître une espèce qui ne cherche qu’une chose, profité un max de manière égoïste et ensuite venir se plaindre.
    brefffff

    1. Bonjour,
      Le seule moyen de lutter contre le piratage ? Mais le piratage sur CC existe bel et bien 😉
      Je ne veux pas trop m’avancer, mais je pense que Adobe a largement profité du piratage de ses logiciels. Le nombre d’étudiants qui piratent leurs logiciels pour s’exercer pendant leurs études sont de futurs employés (ou futurs petits soldats formatés selon le point de vue) qui ne jureront que par les produits Adobe une fois sur le marché du travail. En fait, je pense que tant que les entreprises payent leurs licences, Adobe est dans une situation confortable… Mais confortable ne veut pas dire suffisant.
      De plus, si c’est vraiment pour contrer le piratage, pourquoi pénaliser les moyennes et petites structures qui payaient leurs licences CS honnêtement ? Je rappelle que depuis l’abonnement CC, les artistes qui ne sont pas dans de grosses boîtes sont TOUS perdants à un moment donné ou un autre (cf : voir l’article de Patrick Moll cité plus haut). Alors pourquoi ?
      Je vais répondre à la question. Elle n’engage que moi bien sûr : ils ont proposé l’abonnement pour faire plus de profit. L’abonnement est un leurre pour faire passer la pilule plus facilement, exactement comme les téléphones censés être gratuit en prenant un forfait onéreux avec engagement sur une longue durée. Les seules personnes qui sont gagnants avec les abonnements CC sont les grosses agences de com, avaient-elles besoin d’un rabais sur les licences ? Pas sûr… En revanche les freelances peuvent continuer de crever en pensant faire une affaire ^^
      Ensuite libre à chacun de continuer à dépenser dans les produits Adobe, et vu la qualité de leurs logiciels, je le comprends tout à fait. Je le répète encore une fois : la suite Adobe est un ensemble de merveilles ! Mais personnellement je ne me sers pas de toutes ces merveilles, et la concurrence se réveille avec des qualités et des prix plus attractifs. Il serait ballot de ne pas y jeter au moins un œil pour voir si ça vaut toujours le coup de payer un abonnement CC. 🙂

      1. Je suis photographe amateur (je ne gagne pas ma vie en étant photographe.) et je ne défends pas Adobe, dans le précèdent commentaire.
        Tu as sans doute raison, mais est ce que l’entreprise essaye de faire encore plus de profit ou essaye de compenser les pertes ?

        Dans un cas comme dans l’autre, c’est bien le but de beaucoup d’entreprises ?

        Je me suis arrêté a la version 6 de lightroom, je ne suis pas pour une politique d’abonnement ou de location, pour moi quand tu payes une licence pour acquérir un bien, tu dois pouvoir en jouir comme bon te semble de manière illimite.

        Après est ce qu’Adobe ne vise pas une certaine clientel? Ensuite, avec le haut débit et un marketing hypocrite, est née une génération de personne qui pense que tout doit être à bas prix sur Internet ou gratuit.
        Pourtant, je fais parti des Français avec un revenu moyen, j’aime les outils performant et les appareil Hight tech, mais je n’achète pas si je ne vais pas en avoir l’utilité et encore moins si je n’ai pas les moyens.

        Dernièrement, j’ai eu envie de me remettre à faire du photo montage grâce à Affinity photo et je n’ai pas hésité après avoir compris qu’ils avaient réussi à sortir un soft abouti, au début quand le logiciel est sorti franchement, je ne l’ai pas pris au sérieux.
        Pas besoin de parler du prix, surtout en ce moment, du coup, j’ai acheté Publisher et je vais sans doute aussi prendre Designer, même si je ne suis pas graphiste, mais j’aime créer.

        Évidement, j’ai acheté des formations pour chaque logiciel.

  5. Bonjour,
    Il y a quelques années, j’ai eu la chance de m’acheter la suite ADOBE en tant qu’étudiante ~ 650 euros. Je dois vous dire que par deux fois j’ai changé d’ordinateur et la première chose que j’ai faite après la configuration basique c’est de transférer ma suite ADOBE CS5. Je partage votre avis, la location n’est pas la propriété et revient chère à la longue, les perdants ce sont les “petites gens” (cela n’est pas discriminatoire, ni insultant au contraire j’en fais partie). ça fait du bien de pouvoir râler d’ailleurs c’est tout ce que l’on peut faire.

    1. Râler et tester des alternatives plus abordables J’ai découvert la suite Affinity et j’y trouve mon bonheur pour mon travail au quotidien, et les prix sont accessibles. Si un jour vous avez envie de voir ce que proposent les outils plus récents, n’hésitez pas à jeter un œil sur ce concurrent à Adobe

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